Un défouloir. Elle avait cruellement besoin d'un défouloir. Elle voulait absolument tout casser. Elle voulait hurler. Mais c'était chose compliquée, lorsqu'on était atteint d'aphasie.
Vanislava. Depuis petite, elle était atteinte d'aphasie, et plus précisément de mutisme. Elle était muette. Et peut-être heureusement. Parce qu'elle avait quand même un sacré caractère de merde. Son père, ayant été militaire, avait le sang très chaud, et il hurlait toujours beaucoup sur sa fille qui ne cessait de le provoquer en retournant parfois certains meubles de la maison, allant jusqu'à casser quelques bricoles. Sa mère, elle, était bien plus calme, et plus à l'écoute ; elle essayait toujours de comprendre sa fille, contrairement à son mari. Vanislava et sa mère étaient donc plus proches, mais ça ne l'empêchait pas d'enchaîner conneries sur conneries. Mettre le feu à des poubelles. Casser des vitres. Et parfois même voler des voitures. Tout ça avec son petit groupe de potes qu'elle aimait tant. Vanislava n'avait pas besoin de parler pour se faire comprendre des gens qui avaient pris le temps d'apprendre à la connaître. Pour eux, elle était un veritable petit livre ouvert.
Son loisir préféré s'avérait être le tir à l'arc. C'était pour elle un bon moyen de se défouler durant la journée. Tir à l'arc le jour, et conneries le soir. Il s'agissait non seulement d'un passe temps, mais aussi d'un besoin. Elle devait calmer ses excès d'agressivité qu'elle n'avait pas l'occasion d'exprimer par les mots.
Lorsque son père avait pris connaissance des loisirs nocturnes de sa fille, il avait hurlé, avant de se faire déchiqueter par une créature sortie tout droit des enfers. C'est ici que sa véritable histoire commença. Elle l'avait échappée belle. Ses parents avaient péris, comme beaucoup d'autres. Dont l'un de ses amis. Pendant plusieurs jours, ils avaient entrepris de se serrer les coudes comme toujours afin de survivre ensemble. Pour eux, c'était plus une aventure qu'une mésaventure. L'occasion de changer de routine, peut-être. C'était peut être amusant au début, mais en voyant ses amis se faire attraper, l'un après l'autre, Vanislava se retrouva seule. Elle avait perdu son dernier ami, la personne dont elle avait longtemps été amoureuse, et à qui elle n'avait encore rien dit. Quelle idiote. Maintenant, elle n'aurait plus jamais l'occasion d'exprimer ces sentiments.
Vanislava avait donc fini par errer seule. Survivre seule. Elle n'avait pas vraiment le choix. Elle ne voulait pas encore mourir. Pas maintenant. C'était bien trop tôt. A présent, elle devait simplement penser à sa propre survie. Seule.