Le Conquérant
Les intenses, et réguliers bruits de pas résonnaient à travers les dunes. Le sable brûlant n'attendait plus qu'une chose: recevoir l'offrande que ces braves soldats promettaient. Ces soldats qui ne brûlaient plus que d'une volonté: faire tomber ces corps ennemis. Faire couler ce sang impur, rependre fièrement ce liquide d'une couleur aussi vive que les tissus des drapeaux triomphants, qui semblaient dominer les immenses terres de ce désert. Ces immenses terres envahies par ces fiers soldats. Ces soldats chantant, ces soldats criant la gloire de leur Royaume. L'ennemi tomberait aujourd'hui, la victoire n'avait jamais été aussi certaine. Un désir ardent de combattre parcourait leurs veines, et leur sang bouillonnait de cette volonté enivrante. Ils étaient fiers. Fiers de risquer leurs vies pour leurs terres. Fiers à l'idée de mourir sur ce champ de bataille, en ayant défendu la dignité de leur Royaume. Fiers d'appartenir à ce que ce Royaume avait de plus beau, fiers d'appartenir à ces troupes militaires. Ces troupes, dirigés par un homme dont ils étaient tout aussi fiers. Un homme digne et honorable, un homme brave et grand, un homme dont la puissance au combat n'était égalable par rien, ni personne. Le conquérant, ce Dieu de la guerre, cet homme respecté et admiré de tous ne laisserait pas ces êtres rongés par l’impureté, poser ne serait-ce qu'un de leur pied sale et corrompu sur ce territoire qu'il défendait, à corps et âme. Il ne vivait que pour ça: la Guerre. Cet Art admirable, qu’il maîtrisait à la perfection. Cet Art dont il était le maître, entouré de ces millions de soldats se définissant eux-mêmes comme de fiers et loyaux apprentis, tous admiratifs d’une telle maîtrise. Et cet homme, ce meneur adulé pour toutes les qualités que son âme possédait, ne portait qu'un nom. Un nom connu de tous, aussi respecté et célèbre que celui de l'Empereur, impliquant respect et émerveillement. Un nom derrière lequel se cache un homme aux qualités multiples. Un nom qui, par sa simple évocation, parvenait à faire naître une expression de crainte sur les visage des ennemis, même les plus coriaces. Et ce nom n'était autre que celui de Sahjiel Néhésis.
En ces temps de guerre, ce seul nom résonnait dans tout l'Empire. Il s'échappait des bouches des citoyens apeurés, et s'entendait même au milieu des troupes adverses, bien plus craintives sur leur sort que les citoyens de l'Empire n'étaient sur le leur. Car au final, tous en était persuadé. Avec Le Conquérant dans leur camp, ils ne risquaient rien, et la victoire ne pouvait qu'appartenir à l'Empire. L'espoir d'un peuple tout entier était placé dans un seul nom, dans cette seule personne, dont la puissance, le talent et la vertu n'étaient plus à prouver. Il était évident pour tous, cet ennemi qui avait voulu jouer avec le feu, avec une certitude déraisonnable de pouvoir parvenir à envahir l'Empire, ne tiendrait pas bien longtemps. Les troupes du Conquérant étaient d'une véhémence telle que rien, ni personne ne pourrait jamais se mettre en travers de leur route. Ces soldats, accompagnés de leur chef, apparaissaient comme d'immenses flammes, dans un désert tout aussi immense. Le tout formait un gigantesque feu, que l'ennemi ne pourrait jamais maîtriser. Les troupes étaient ici chez elles. Ce sable chaud, elles ne le connaissait que trop bien. Au beau milieu de ces immenses dunes qui s'étalaient à perte de vue dans ce désert aride, les soldats savaient reconnaître leur chemin. La confiance était à son paroxysme. Les millions d'hommes formaient de titanesques blocs noirs, tachés par une multitude de drapeaux rouge que faisaient fièrement s'élever certains soldats. La scène était d'une beauté vertigineuse. Parmi ces dunes, pourtant immenses, se dressait un nombre époustouflant d'hommes. Tous étaient positionnés adroitement et stratégiquement, dans une étendue de formes géométriques qui s'étalaient à perte de vue. C'était enivrant, et le désert paraissait si petit à côté de ces troupes. C'était une scène splendide et démesurée, que le meneur surplombait de cet éternel air impassible, de cette posture droite et imposante, dans une détermination des plus totales. Une détermination qu'il avait réussi à transmettre à ses guerriers, prêts à recevoir l'ordre ultime que leur crierait leur chef. Tous le savaient: ils ne pouvaient perdre. Ils étaient prêts à faire couleur le sang de l'ennemi, prêts à sauver l'honneur de leur pays, prêt à faire payer cet affront que ces hommes impurs regretteraient amèrement. Ils étaient prêts, et n'attendait plus qu'une seule chose: l'ordre de combattre à corps et âmes cette impureté qui ne méritait d'exister.
L'ordre venait d'être lancé. Dans un immense vacarme, des hommes enragés, assoiffé de combat et de sang, s'étaient précipité sur l'ennemi, lançant de terribles et terrifiants cris de détermination. Le sang des braves soldats bouillonnait d'une volonté intarissable, qui rendait leur folle course inépuisable. On ne pouvait plus les arrêter, les lions étaient lâchés. Tandis que les premières lignes venaient d'atteindre le début des rangées adverses, les derniers attendaient hâtivement de pouvoir faire s'abattre à leur tour la lame tranchante de leurs épées affûtées. Plus les minutes avancèrent, plus la scène se transformait en un véritable massacre pour le camp adverse. Leurs hommes tombaient, ils criaient, ils agonisaient sous les coups habiles des guerriers du Conquérant. Ils le savaient: ils n'avaient aucunes chances. Et pourtant, leur chef s'entêtaient, et persistaient à continuer le combat. Cela faisait deux heures que les soldats animaient cet ardent désert. Deux heures que l'ennemi perdait toujours plus d'hommes. Deux heures que le sang de l'adversaire ne cessait de couler, sans aucune réciprocité. Et Sahjiel ne comprenait pas. Il ne parvenait pas à comprendre pourquoi l'ordre restait le même. l'ordre d'attaquer, de continuer le combat, alors qu'ils étaient dans un désavantage le plus total, alors que leur nombre commençait à diminuer dangereusement, et toujours plus rapidement. C'était de la folie. Une folie déraisonnée qu'il ne parvenait pas à saisir. Alors, il avait observé la tuerie dont il était l'unique responsable. Une extermination inhumaine, commanditée par le chef suprême des armées qu'il était, après l'Empereur. Sahjiel était dirigeant de tous ces beaux et fiers soldats, qui poursuivaient cette belle et rassurante illusion: ces hommes étaient impurs, et devaient mourir pour leurs crimes. Oui, tous ces hommes étaient persuadés d'une seule et unique chose: les envahisseurs devaient mourir. Un sort arbitraire, mais totalement justifiée par ces paroles chimériques dans lesquelles ils baignaient. Ancrées dans leurs esprits par un discours passionné à en couper le souffle, les soldats n'avaient plus que ces paroles qui se jouaient en eux. L'ennemi devait mourir, c'était un sort juste et mérité. Ils avaient alors embrassé cette illusion, bien plus agréable que l'hideuse vérité qui méritait d'être cachée. Un devoir chimérique, une réalité illusoire dont Sahjiel en était l'unique créateur. Faire s'écrouler impitoyablement l'ennemi, dans un bain de sang total, pour sauver la dignité de l'Empire. Pour les punir de l'affront qu'ils commettaient. Pour éviter que leurs âmes impures n'entrent dans ces terres sacrées. Il justifiait cette extermination auprès de ses soldats, comme s'il s'agissait de la seule et unique possibilité. Comme s'il en était impossible autrement. L'extermination, c'était le seul sort que méritait l'ennemi. Une extermination pour laquelle on l'applaudirait, on l'admirerait et crierait les plus belles louanges à son égard. Et Sahjiel garderait cet air impassible, comme si rien ne l'atteignait. Comme si tout était parfaitement normal. Car après tout, il n'avait que son devoir, n'est-ce pas?
Perché en haut de ces dunes, une question subsistait tout de même. Pourquoi? Pourquoi, malgré la puissance connue et reconnue de l'Empire, malgré les lourdes forces armées que Sahjiel guidait... Pourquoi ce Royaume avait tenu à envahir ces terres, pourtant en connaissance de cause? Avec un peu de réflexion, un massacre aurait pu être évité. Mais non. Non, et Sahjiel était l'auteur de cette tuerie. Une énième tuerie qu'il avait commandée, et que tout le monde fêterait.
Alors que les ardents rayons du soleil venaient caresser sa peau, provoquant un légère mais agréable brûlure, alors que la brise emportait avec elle de petits grands de sable chauds qui venaient doucement s'abattre sur son visage, Sahjiel, d'un œil attentif, observait. Il observait ses troupes pleines de volonté se précipiter sur l'ennemi. Ses sens étaient en éveil, son esprit pensif et empli de questions. Comment? Qu'avait-il fait pour se trouver ici, perché sur cette dune, tenant la tête des plus grandes armées de l'Empire, et peut-être même, du continent tout entier? Comment en était-il arrivé à commanditer un tel massacre, qui n'était pas le premier, et ne serait sûrement pas le dernier?
Ses pensées déferlaient. Comment, pourquoi? Un retour en arrière. Des vestiges de souvenirs plus ou moins lointain que sa mémoire ramenait à la surface. Ce garçon aux cheveux courts, il le revoyait encore. Plongé dans ses livres, étudiant sans relâche avec une passion étonnante, noyé dans un esprit de guerre, dans des entraînements difficiles et toujours plus intenses, occupé à l'apprentissage d'innombrables techniques de combat, à l’exercice jusqu'à la parfaite maîtrise des armes... Oui, ce fils d'un haut gradé militaire, ce garçon à l'enfance rude et sévère, mais au parcours tapissé d'excellence et de réussite, Sahjiel s'en souvenait très bien. Ces journées passées transpirer, à s'épuiser contre un cible faite de bois, ces nuits passées à étudier tous les sujets pour lesquels il se prenait de passion, et ceux que l'école imposait à l'étude... Des jours peu reposants, rythmé par un enseignement militaire tout aussi fatiguant. Un enseignement imposé par son père. Une obligation que ce jeune garçon avait fini par apprécier. Car, chaque jour, le jeune homme se surpassait. Il s'était surpassé, sans jamais renoncer. Sans jamais douter de la voix qui avait été choisie pour lui. Était-ce peut-être pour répondre aux attentes exigeantes que son père avait? Peut-être. Mais, une fois ces dernières atteintes, le dur travail n'avait pas cessé. À 19 ans, ce garçon avait atteint un niveau que bien peu de gens avaient réussi à atteindre. Érudit et excellent en combat, il avait bien tout pour réussir. Il avait tout, et son père en était conscient. Alors, dès ses 20 ans, il fut envoyé à l'armée. Son père le savait, son avenir était là-bas. Tout comme lui, son fils devait servir l'Empire, et s'ériger comme un excellent élément. Peut-être même encore meilleur de lui. Car, en plus de posséder un véritable talent pour le combat, ce garçon était, grâce à toutes les connaissances qu'il avait amassé, volontairement ou non, un homme instruit. Un homme instruit et bien plus qu'excellent en combat, que personne ne pourrait surpasser. Oui, ce garçon avait tout pour réussir au sein de l'armée. Il avait tout, et ce fut sans surprise que ce jeune homme excella dans ce nouveau milieu. Il excella, jusqu'à gravir des échelons de plus en plus haut. Jusqu'à ce que ce fameux jour n'arrive. Ce jour où il fut nommé par l'Empereur lui-même, à la tête des Armées. Ce jour où il prit véritablement conscience de tout ce qu'il avait achevé jusque-là. De tout ce monde qui connaissait déjà son nom, et de tous ceux qui le connaîtrait dès à présent. De l'admiration qu'il avait déjà fait naître dans certains cœurs. De toutes ces choses dont il ne s'était encore jamais rendu compte, malgré les nombreuses victoires qu'il avait déjà à son actif. Mais, ce titre, il ce garçon en avait été persuadé, allait pouvoir l'aider à réaliser ce désir qui ne l'avait pas quitté depuis 20 ans. Ce désir de rendre ce monde beau, en y apportait équilibre et sérénité. Amener la paix, par la guerre.
Oh, tout cela, Sahjiel s'en souvenait. Il se souvenait de ce garçon aux cheveux courts et de son parcours prestigieux comme si c'était lui. Il se souvenait de ce jour rempli d'espoir. Un espoir qui s'était bien vite transformé en désillusion. Car ce garçon, c'était bien Sahjiel lui-même. La seule différence qui le séparait de ce jeune homme était la longueur de ses cheveux. Des cheveux qu'il avait arrêté de couper, depuis ce jour où il avait été rempli d'espoir. Une décision symbolique, de laquelle il ne pouvait se résoudre à se détacher. Ce garçon au cheveux courts était devenu un homme de 35 ans, responsable du massacre de ces dunes. Était-ce ça, la paix qu'il avait toujours voulu?
Ce massacre... C'est moi qui l'ai commandé. Et je n'ai fait que défendre mon territoire. Mais ils sont morts, par ma faute. Pourtant, ils le savent. Il savent que cet Empire ne peut être attaqué aussi facilement. Ils le savent ... Alors pourquoi persistent-ils à envoyer leurs hommes dans une tuerie certaine?
Il n'y avait pas échappé. Sahjiel défilait sous les acclamations des citoyens, présents de chaque côtés de l'allée, pour accueillir les fiers et victorieux soldats. Pour acclamer le guerrier puissant, celui à qui on devait la vie et la sécurité. Chanter les louanges de cet homme, qui avait abattu sans la moindre pitié l'offenseur, dans ce but honorable de garantir la liberté des citoyens de l'Empire. Cet offenseur que Sahjiel avait voulu voir, pour le convaincre de battre en retraite. Sur son cheval, il avait alors galopé dans l'espoir d'atteindre cet offenseur. Il avait galopé au travers de l'immense champ de bataille, détachant quelques têtes, transperçant quelques malencontreux corps qui se jetaient sur lui... Et cet offenseur, il l'avait atteint. Il l'avait atteint, mais sans avoir eut le temps de dire quoi que ce soit, son épée s'était retrouvé planté dans le torse de l'assaillant. Il avait vu ce regard plein de rage, cet air sombre et déterminé... Peu importe qui cet homme était pour le Royaume adverse... Il était désormais mort. Comme l'infinité de soldats à ses ordres. Tous mourraient ici même. C'était cet exploit que tous ces citoyens acclamaient aujourd'hui. Applaudir le meurtre de l'assaillant. Cet assaillant que Sahjiel avait tué, avant qu'il ne le tue lui. Applaudir ces soldats de l'Empire, et leur immense dévotion pour leurs terres. Chanter les louanges de ces braves guerriers, et de leur Art si spécial...
Les immenses sourires, les jets de pétales de roses et les yeux remplis d'admiration de ces hommes et femmes, de ces enfants désireux de devenir comme lui... Un soldat imbattable, puissant et haut classé, impassible et insensible... Insensible. Insensible parce qu'il devait le paraître. Impassible parce qu'il devait l'être. Garder cet air distant, agir comme un chef guerrier. Ne surtout pas pleurer pour la mort d'un compagnon. Ne jamais exprimer son avis personnel. Sahjiel était prisonnier. Prisonnier de ses devoirs, de ses obligations... Et de son titre. Ce titre, qu'il avait pensé être une libération des chaînes de ses anciens supérieurs était bien pire encore, bien plus fourbe que ce qu'il avait toujours vécu. Aux côtés de l'Empereur, il ne pouvait ni le contredire, ni fuir. Aller dans son sens, respecter ses idées, acquiescer à chaque nouveau projet de conquête qu'il posait sur la table. Le Conquérant. Qu'il portait bien son titre. De la puissance de Sahjiel, de ses talents de stratèges, l'Empereur en avait bien profité. Excellent sur le terrain, tout aussi bon à l'élaboration des stratégies, Sahjiel avait été l'homme parfait pour réaliser les égoïstes ambitions de l'Empereur. Ce titre du Conquérant, il l'avait bien gagné. Le nombre de soldats innocents, le nombre de hauts placés qu'il avait tué pour satisfaire l'Empereur, et ses envies de puissance... C'était innombrable, et Sahjiel était simplement prisonnier d'une spirale de laquelle il ne pourrait jamais s'enfuir, au risque d'être accusé de traîtrise. Au risque de mourir, sans même avoir pu répandre cette paix qu'il désirait tant...
Prisonnier. Il était prisonnier du magnifique rôle à la triste vérité qu'il avait. Un guerrier puissant et imbattable, avec cependant un nombre incalculable de cicatrices sur sa peau mate. Un homme insensible, se passionnant pour les arts créatifs,tel que la musique et la peinture. Sahjiel avait beaucoup de passions, qui ne pouvaient être dévoilées au grand jour. Le mythe de l'homme froid, de l'homme dur et puissant, centrant ses longues journées sur des entraînements vigoureux et épuisants... Mais tout ça, ça n'était pas Sahjiel. Cet homme qui, secrètement, s’exerçait à tous les instruments qu'il possédait. Cet homme qui, toujours aussi secrètement, peignait, se posait au milieu d'une nature verdoyante et pensait, faisait le vide. Prenait le temps. Cet homme qui avait pour habitude de sourire à la moindre personne qu'il croisait sur son chemin. Cet homme qui avait toujours cherché la paix, intérieure et extérieure. Mais non. Il était prisonnier. Tout ce qu'il aimait faire, tout ce pour quoi il se passionnait, que ce soit de la science, à des activités plus créatives, tout ça devait être fait dans un secret des plus total. Sahjiel, d'une nature plutôt sensible et douce, devait agir comme un "vrai" homme, en semblant éprouver ni peine, ni compassion. Les pleurs n'étaient pas permis. Les doux sourires emplis de bienveillances non plus. Parler de paix l'était encore moins. Doucement, il s'était enfermé dans cette prison de laquelle il ne pouvait plus sortir. C'était trop tard. En s'imposant comme ce grand guerrier triomphant et puissant, en étant victorieux aux yeux des autres, il était le grand perdant à ses yeux.
Sahjiel Néhésis
Toutes ces pensées étaient épuisantes. Ces constantes contradictions entre son attitude et sa nature était une véritable torture. Chaque soir, ou presque avait le droit à sa crise d’existence. Il était enfermé dans ce piège, et il en était parfaitement conscient. Ce piège qui l'obligeait à semer le chaos et la violence, alors qu'il voulait répandre paix et sécurité. Ce piège qui le forçait à rester de marbre lorsqu'un événement tragique survenait qui l'obligeait à ne pas montrer sa douleur lorsqu'il venait d'être blessé, qui lui mettait la pression à chaque comat dans lequel il s'engageait. Il ne pouvait pas perdre. Il n'avait pas le droit à l'erreur, qui était pourtant bien humaine. Il ne pouvait être en désavantage. Personne ne devait apprendre que lui aussi, ce dieu de la guerre, pouvait faillir au combat. Le Conquérant. Garder ce titre pour lequel les citoyens le connaisse, et réaliser les innombrables demandes de l'Empereur. Obligé de se taire, ne jamais exprimer son avis dans la crainte de vexer, de déplaire, ou même d'être désapprouvé, et de perdre toute la légitimité qui lui était accordée... Tout cela était bien trop dur pour Sahjiel, qui était l'opposé absolu de celui qu'on lui demandait d'être. Qui avait, au final, des volonté et valeurs absolument contraires à celles de l'Empereur. Cette façon de vivre était insoutenable, et pourtant, il devait la soutenir. Il ne pouvait pas faire autrement, il n'en avait plus le choix. Élu par l'Empereur... Qu'il avait été bête de penser que ses chaînes seraient ainsi délivrées... En même temps, c'était stupide de penser que l'Armée aurait pu l'aider dans la réalisation de ses désirs... La guerre et paix? Deux antithèses, deux mots absolument discordants qui jamais ne pourront aller ensemble. C'était pourtant évident, et Sahjiel avait voulu croire l'inverse... Mais pourquoi l'inverse avait-il même traversé son esprit? Antithèse, tout était dans le titre.
"On ne fait pas la paix avec la guerre, et pourtant j'ai choisi la guerre. Et à ce choix, je ne peux plus y remédier. Il n'y a plus d'issue de secours, je suis prisonnier de ma victoire, et dans cet échec, j'y emporte bien plus de monde que ma seule personne."